Le dernier stade de la soif, de Frederick EXLEY
Présentation de l'éditeur :
Frederick Earl Exley (1929-1992) est à la fois unique et emblématique. Unique, car il habitait un univers étrange, et n’obéissait à aucune règle, excepté les siennes ; emblématique car, en écrivain américain typique, sa légende s’est faite sur un seul livre. Inédite en France, l’inimitable «autofiction» de Frederick Exley, Le Dernier stade de la soif, est considérée comme un classique depuis sa première publication en 1968.
Avec mordant et poigne, Exley décrit les profonds échecs de sa vie professionnelle, sociale et sexuelle. Ses tentatives pour trouver sa place dans un monde inflexible le mènent aux quatre coins du pays, mais surtout à l’hôpital psychiatrique d’Avalon Valley.
Au gré des bars, des boulots et des rencontres improbables, l’obsession d’exley pour la gloire, les New York Giants et leur joueur star, Frank Gifford, grandit.
Dans ses mémoires fictifs, en plongeant la tête la première dans ce «long malaise» qu’est sa vie, Frederick Exley transforme la dérive alcoolisée d’un marginal en une épopée renversante.
Chargé en grande partie de ce qu’il appelle «les fardeaux du chagrin» et de catastrophes ordinaires, ce premier roman est un époustouflant voyage littéraire. C’est drôle. C’est touchant. C’est à la fois Nabokov et Bukowski et Richard Yates et Thomas Bernhard.
Mon avis : Tout d'abord un immense merci à et aux éditions Monsieur Toussaint Louverture pour ce partenariat exceptionnel. Exceptionnel ? Oui, et cette exception tient à divers facteurs : tout d'abord la qualité indéniable et remarquable de l'édition, une couverture superbe, un papier très agréable, une préface de haut vol par Nick Hornby, rien de moins et aussi une présentation service de presse très classe. Ceci pour parler de l'"emballage"... Quant au contenu, là, on touche au génie. La question n'est pas de savoir si l'autobiographie est fictive ou non, loin de là. Ce qui compte, c'est surtout cet anti-héros à la fois attachant et remarquable de détresse et de dérision, une sorte de clochard céleste qui pratique avec ferveur et assiduité l'échec, quoi ce soit dans le domaine sentimental, ainsi qu'on l'apprend dès le premier chapitre où le narrateur nous évoque sa relation fusionnelle avec l'alcool, dans le domaine professionnel où ce même narrateur réussit avec un aplomb incroyable à se saborder sans cesse, ou encore dans le domaine des relations familiales ou amicales. Un drôle de héros, donc, qui cultive sa singularité dans une Amérique des années 60 où le succès est la condition sine qua non à toute existence. Le portrait du héros est savoureux certes, mais ce qui marque le plus, à mon sens, dans ce roman, c'est le regard porté sur la société américaine, ses codes, ses limites et la façon de traiter les marginaux. On rit parfois ( souvent ) des déboires du héros, mais on se pose aussi des questions sur l'existence, sur la famille et ses valeurs, le milieu professionnel, les amis, leur rôle quand on ne va plus très bien. Bref, un grand moment de littérature, à (re)découvrir de toute urgence.